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La baisse des dotations aux préfectures est-elle économiquement viable ?

Le 15 mars 2022
La baisse des dotations aux préfectures est-elle économiquement viable ?

En tant qu’avocat en droit des étrangers, je suis, comme mes confrères, souvent confronté à un système duquel la logique semble absente. D’un côté on baisse les moyens des préfectures, mais de l’autre, les conséquences qu’entraînent cette baisse représentent un coût certain pour la collectivité. Et il ne s’agit pas que d’un coût humain, mais bien aussi économique.

Comment se manifeste la baisse des effectifs au quotidien ?

Tout le monde ou presque a déjà vu des images de ces longues files d’attente à l'entrée des préfectures. Si elles semblent moins importantes aujourd'hui, cela n’est pas dû à une amélioration des conditions d’accès à ce service public.

Avant la crise sanitaire, il n’était déjà presque plus possible de se rendre en préfecture sans rendez-vous.

Désormais, dans ce nouveau monde post-Covid, pour déposer un dossier, soit il faut le faire exclusivement en ligne, soit il faut prendre un rendez-vous, toujours exclusivement en ligne.

Cette pratique perdure malgré le fait que le Conseil d’État ait considéré que c'était illégal, quand il n’y avait pas d’alternative (voir notamment Conseil d’État 27 novembre 2019, n° 422516).

Or, pour prendre un rendez-vous en ligne, il faut pratiquement systématiquement :

- soit en passer par un avocat pour qu’il soit enjoint au préfet de donner un rendez-vous, captures d’écran à l’appui démontrant qu’il est impossible d’obtenir un rendez-vous ;

- soit en passer par un marché noir des rendez-vous, qui se vendent entre 100 et 500 euros.

Dans un cas comme dans l’autre, cela coûte cher, en frais d’avocats, ou du fait de laisser prospérer une économie parallèle.

Et après ?

Ensuite, les délais de traitement se sont considérablement allongés ces dernières années. Ainsi, une fois le dossier déposé, il faut attendre parfois jusqu’à 10 mois pour qu'il soit instruit. Parfois même plusieurs années, sans que l’on en comprenne les raisons.

En théorie donc, pour faire bien, il faudrait demander le renouvellement de son titre de séjour, quand il est valable un an, deux ou trois mois après l’avoir obtenu.

Lorsque le dossier est déposé en personne après obtention d’un rendez-vous, il permet de se voir remettre un récépissé. Qui doit être renouvelé (car d'une durée de généralement de trois ou quatre mois), ce qui potentiellement ouvre la voie à de nouvelles procédures. 

Lorsqu’il doit être déposé de façon dématérialisé voire, parfois, envoyé par la Poste, il faut alors attendre plusieurs mois avant de pouvoir peut-être obtenir un récépissé de dépôt de dossier.

Ce qui signifie que si le demandeur dépose seulement quelques semaines avant l’expiration de son titre de séjour, comme cela est conseillé, il se retrouve en situation irrégulière pendant plusieurs mois.

En cas de problème avec son employeur, qui peut avoir peur de cette situation qui peut l'amener au pénal, il faut donc engager à nouveau une procédure.

Ceci alors que les postes à pourvoir restent nombreux, et que donc ces embuches n'entraînent nullement un regain d'embauches nationales.

Le coût économique peut-il être appréhendé plus globalement ?

Cette situation, outre les coût au sein des préfectures, pose un problème soulevé par un article du Monde :

« « Ainsi la France, 6e puissance économique mondiale, n’est que 19e au classement mondial “compétitivité et talents” élaboré par [l’école privée de management] l’Insead, qui mesure la capacité d’un pays à attirer, produire et retenir des talents », constatent des économistes dans une note du Conseil d’analyse économique de novembre 2021. »

Et le journal de rappeler par ailleurs, concernant les professions hautement qualifiées dont certains postes sont occupés par des étrangers (qui ne sont pas mieux traitée que les autres) :

« Dans bien des pays, nombre de prix Nobel n’auraient pu être décrochés sans ces scientifiques ou artistes venus d’ailleurs. Ainsi au Royaume-Uni : sur les 45 primés depuis 1969, quinze étaient nés à l’étranger ! ».

Si vous avez des problèmes pour obtenir un rendez-vous, ou pour pouvoir monter un dossier, ou même si vous voulez contester un refus d’octroi de titre de séjour, n’hésitez pas à faire appel à moi.